Que pèsent les religions « étrangères » en Chine ?

Que pèsent les religions « étrangères » en Chine ?

Si des statistiques fiables sont difficiles à établir, le christianisme et l’islam, qui ne représentent que 5 à 6 % de la population, se développent considérablement. Le pouvoir entretient des relations complexes avec ces religions d’origine étrangère. En 2016, à l’occasion d’une conférence du Parti communiste sur les religions – la première depuis plus de quinze ans –, le président Xi Jinping appelait à la vigilance contre « les infiltrations des idées étrangères au nom de la foi religieuse ».

Le christianisme en Chine a été introduit au XVIIe siècle par les pères jésuites, puis, à la suite des guerres de l’opium, avec l’ouverture du pays aux missions étrangères. Il y aurait de nos jours environ 11 millions de catholiques et 40 millions de protestants1. L’accélération de cette augmentation depuis 1978, alors que le nombre de chrétiens déclarés ne dépassait pas 500 000 en 1949, est particulièrement remarquable.

La communauté chrétienne est dominée par le protestantisme. Les églises protestantes sont très actives, avec le développement d’un phénomène de megachurches à l’américaine, et seule une minorité, regroupant de 10 à 15 millions de fidèles, est affiliée à l’organisation officielle « patriotique » protestante sous l’autorité de l’État chinois. Afin de reprendre le contrôle, les autorités ont lancé en 2013 une campagne de destruction de croix, qui aurait frappé plus d’un millier d’églises dans l’est de la Chine.

Les catholiques sont moins nombreux, avec 11 millions de pratiquants, dont la moitié seulement est affiliée à l’Association patriotique catholique de Chine, créée en 1958 par les autorités chinoises qui ne reconnaissent pas l’autorité du Vatican. Régulièrement évoquée, la normalisation des relations entre la Chine et le Vatican se heurte aux questions de la nomination des évêques, de la liberté de culte et de la persécution des églises clandestines, qui se sont développées hors de l’autorité de l’État. Un accord portant sur la nomination des évêques a toutefois été signé en 2018.

Le pouvoir s’inquiète de l’autonomie croissante, y compris dans le domaine financier, de ces églises, de leur capacité d’organisation, de leur audience auprès des populations urbaines éduquées, et de leur rôle dans l’émergence d’une société civile autonome favorable aux dissidences.

L’islam, qui représente plus de 23 millions de croyants, est présent en Chine depuis le VIIe siècle, transmis par les communautés de marchands venus d’Asie centrale ou d’Asie du Sud-Est. Une distinction a été établie entre une communauté musulmane « chinoise », les Huis, traditionnellement mieux intégrée à la société et aux élites administratives et commerçantes, et les musulmans du Xinjiang, pour qui la religion constitue, selon les autorités, un élément de distinction favorisant le « séparatisme ».

La pratique religieuse chez les Huis a bénéficié de l’ouverture qui a suivi la Révolution culturelle. En revanche, depuis la fin des années 1980, elle est de nouveau réprimée au Xinjiang. Les pratiques et les signes religieux, tels que le port du voile ou la pratique du ramadan, sont contrôlés et interdits pour les fonctionnaires, les étudiants et les enfants mineurs. Comme pour le christianisme, le pouvoir s’inquiète de l’émergence de contre-pouvoirs qui fragiliseraient le monopole idéologique du Parti communiste et la stabilité d’un système politique contesté. La répression contre toute pratique religieuse assimilée au « séparatisme » s’est encore renforcée sous la direction du président Xi Jinping.