Que signifie la fin de la politique de l’enfant unique en Chine ?
Pendant plus de trente-cinq ans, la Chine a été soumise à la politique de l’enfant unique au sein de sa société. Avec près de 1,4 milliard d’habitants, la puissance démographique est liée à l’image de puissance globale de la Chine. Mais, en 1980, Deng Xiaoping a imposé une politique de contrôle des naissances, autorisant un enfant par famille et deux dans les zones rurales en cas de handicap du premier né ou si l’aîné est une fille.
Il s’agissait de favoriser le développement économique en freinant une croissance démographique encouragée par Mao Zedong pour qui « un homme, c’est une bouche à nourrir, mais aussi deux bras pour travailler ».
Cette mesure a entraîné une chute du taux de fertilité qui était en 2017 de 1,68 enfant par femme en âge de procréer, et est très en dessous du taux de remplacement de 2,1 enfants par femme. Cette politique malthusienne, basée sur un système de quotas strictement appliqués par les autorités locales, a eu des effets pervers. La politique de l’enfant unique a accéléré le délitement des structures familiales anciennes, fondées sur des réseaux étendus de relations, et a entraîné le phénomène des « petits princes », enfants surprotégés, suralimentés et hypergâtés, qui concentrent l’attention et les attentes de leurs aînés. Alors que, notamment en milieu rural, la naissance d’un fils est vitale pour la perpétuation des rites ancestraux et la survie de la famille, on constate un fort déséquilibre des naissances qui peut atteindre 120 garçons pour 100 filles.
Outre les campagnes massives d’avortements et de stérilisations forcés, le phénomène spécifique des « enfants noirs », nés dans la clandestinité et dénués d’existence légale, s’est développé. Leur nombre est officiellement évalué à 13 millions, mais les statistiques en la matière sont par nature peu fiables. Parallèlement, on assiste à des trafics de garçons et de jeunes femmes, ainsi qu’à un retour à des pratiques anciennes d’abandon des filles ou d’infanticide à la naissance.
La politique de l’enfant unique, en déséquilibrant artificiellement la pyramide des âges, est en passe de remettre en cause l’un des atouts de l’économie chinoise : une main-d’œuvre jeune et abondante. En 2012, pour la première fois, les autorités ont annoncé une diminution des nouvelles classes d’âge entrant sur le marché du travail et cette tendance va en s’accélérant : en 2015, la population en âge de travailler a diminué de 4,87 millions.
Malgré ces dysfonctionnements reconnus, il faudra attendre 2016 pour que de nouvelles règles – deux enfants par famille – levant l’obligation d’autorisation préalable soient adoptées. Il n’est pas certain toutefois qu’elles aboutissent à des bouleversements majeurs en matière démographique. Dans les villes, depuis les années 1990, on constate que la réduction des naissances est au moins autant liée au coût de l’éducation et à l’évolution des modes de vie qu’à la politique de l’enfant unique. Après une période malthusienne, les autorités font au contraire pression sur les familles pour avoir plus d’enfants, sans succès pour l’année 2019 qui a vu une poursuite de la chute des naissances.