La Chine est-elle une puissance nucléaire responsable ?
Mao Zedong a qualifié la bombe atomique de « tigre de papier », mais c’est lui qui a doté la RPC de cette capacité, jugée indispensable face aux superpuissances américaine et soviétique. La Chine est devenue une puissance nucléaire depuis 1964, date de son premier essai, et appartient au club fermé des cinq puissances nucléaires officielles au sein du TNP (traité de non-prolifération)1.
Depuis, elle n’a eu de cesse de renforcer la crédibilité de ses capacités nucléaires et balistiques, l’objectif étant de disposer d’une force de dissuasion « limitée mais suffisante ». Toutefois, son arsenal nucléaire demeure opaque, et Pékin refuse toute transparence en la matière. Les stratèges chinois considèrent que le secret sur le nombre réel et le positionnement des têtes nucléaires est essentiel pour préserver l’efficacité de ces moyens face aux États-Unis et à la Russie.
On sait toutefois que Pékin dispose d’une capacité limitée de seconde frappe en l’absence d’une force sous-marine réellement opérationnelle. Ses missiles balistiques terrestres, en revanche, lui permettent d’atteindre les États-Unis et l’ensemble de ses voisins, dont l’Inde, le Japon, la Corée du Sud ou Taïwan.
La Chine met en avant la spécificité de sa doctrine nucléaire, présentée comme strictement défensive et fondée sur le double principe du non-usage en premier et du non-usage face à un État ou à un groupe d’États non nucléaires, et se prononce pour l’interdiction totale et la destruction des stocks d’armes nucléaires. Mais, derrière cette position de principe vertueuse, la réalité est moins claire. Les capacités nucléaires, en toile de fond, contribuent à renforcer sa capacité de coercition et d’interdiction. En 2005, un général chinois a ainsi déclaré que, en cas de frappes américaines sur le territoire chinois avec des armes conventionnelles de haute précision, « la Chine était prête à détruire plusieurs centaines de villes aux États-Unis ».
Si la Chine s’est engagée en faveur de la non-prolifération nucléaire, après avoir contribué directement ou indirectement au développement des capacités d’États problématiques comme le Pakistan ou la Libye, elle refuse toujours un processus de contrôle des armements qui aboutirait à une réduction de son arsenal. Pour Pékin, ce processus ne pourra être amorcé que lorsque le fossé capacitaire aura été comblé avec les deux superpuissances nucléaires que sont la Russie et les États-Unis2. Pékin refuse également d’intégrer les négociations sur l’interdiction des missiles nucléaires intermédiaires en arguant de la faiblesse de son arsenal.