Pourquoi la Chine fait-elle peur en Asie du Sud-Est ?

Pourquoi la Chine fait-elle peur en Asie du Sud-Est ?

La Chine a longtemps bénéficié d’une image positive en Asie du Sud-Est1. Son dynamisme économique, les opportunités offertes par le développement des échanges et des investissements ont œuvré en faveur d’une intégration croissante avec la puissance chinoise.

Ce positionnement connaît toutefois une nette évolution depuis la fin des années 2000. Abandonnant la stratégie de modestie et de prudence prônée par Deng Xiaoping, la Chine a choisi de profiter de la période d’opportunités qui s’ouvrait à elle, selon les analystes chinois, en raison de l’affaiblissement des États-Unis, pour adopter une stratégie plus offensive dans sa région. En 2010, lors d’un sommet de l’APEC (Asia Pacific Economic Cooperation) à Hanoï, le ministre chinois des Affaires étrangères Yang Jiechi a choqué l’ensemble des pays de la région en déclarant que « les petits pays devaient tenir compte des intérêts des grands pays ». Ce retour d’une Chine puissance dominatrice dans sa zone d’influence traditionnelle provoque une réaction de rejet, même si les intérêts économiques l’emportent pour beaucoup de pays de la région.

Depuis, Pékin multiplie les initiatives pour reconquérir le terrain perdu. Le projet de route maritime de la soie présenté en 2013 est une manière de remobiliser l’attractivité économique de la Chine pour séduire les pays d’Asie du Sud-Est. La Chine exploite également les failles qui existent au sein des pays de l’ASEAN entre les États dépendants et proches de Pékin, comme le Cambodge ou le Laos, et les États plus distants comme le Vietnam. En 2020, la Chine a également utilisé la diplomatie des masques et du vaccin, en dépit des hésitations de ses partenaires2.

L’efficacité de la stratégie d’apaisement chinoise est réduite par ses avancées en mer de Chine du Sud. En dépit de la condamnation de la Cour internationale d’arbitrage de La Haye en 2016, Pékin continue de revendiquer la quasi-totalité de la mer de Chine du Sud à l’intérieur d’une « ligne en neuf points », qui n’a aucune existence légale, et les deux archipels des Paracels et des Spratleys qui s’y trouvent. Profitant de la faiblesse de ses partenaires, la Chine a remblayé plusieurs îlots, construit des installations militaires et mis en place des divisions administratives censées justifier son occupation. Utilisant d’une manière combinée ses flottilles de pêche, qui constituent une milice maritime, ses bâtiments de garde-côte et ses forces navales en appui, elle tente d’occuper le terrain et d’imposer un nouvel état de fait.

Face à cette offensive, les pays de la région cherchent ailleurs des soutiens, au Japon et aux États-Unis et jusqu’en Europe pour défendre un espace libre et ouvert.