Comment fonctionnent les organes de sécurité intérieure en Chine ?
Pour affirmer son autorité, le régime mobilise un important appareil de sécurité dont le budget est passé de 22 milliards de dollars en 2003 à 139 milliards de dollars en 2019. En 2014, une commission dirigée par Xi Jinping, dont l’objectif est d’assurer à la fois la sécurité de l’État et la stabilité sociale, en prenant en compte un continuum de menaces entre la situation intérieure et les défis externes, a été mise en place. La mission de rationalisation de l’appareil de sécurité est double : parer à la multiplication des attentats depuis 2010, et reprendre en main les organes de sécurité dans le cadre de la lutte de clans, qui s’est notamment traduite par l’arrestation de Zhou Yongkang, le tout-puissant chef de la sécurité de 2007 à 2012.
Les composantes de l’appareil de sécurité de l’État et du Parti communiste sont garantes de la stabilité. Le ministère de la Sécurité publique assume la sécurité intérieure, dont la sécurité « politique ». La Police armée populaire (PAP), organisation paramilitaire composée en 2016 de plus d’1 million d’hommes, est placée sous l’autorité à la fois du ministère de la Sécurité publique et de la Commission militaire centrale. La première mission de la PAP est de garantir la stabilité intérieure, au service du Parti communiste. Le ministère de la Sécurité d’État, en charge du contre-espionnage, joue un rôle dans le contrôle des « activités contre-révolutionnaires visant à saboter ou renverser le système socialiste ».
Au sein du Parti communiste, des procédures administratives permettent un internement prolongé, en dehors du système judiciaire. Cette procédure est appliquée dans le cadre du programme anti-corruption contre les membres du Parti communiste. Les assignations à résidence d’opposants sont courantes, ainsi que les prisons non officielles visant les porteurs de pétitions qui tentent de faire entendre leurs griefs en s’adressant aux échelons administratifs supérieurs.
Le système des camps de travail, créé dans les années 1950, n’a pas disparu. En 2013, le système de « rééducation par le travail1 », essentiellement destiné au contrôle des « asociaux », petits criminels, drogués, prostitués ou vagabonds, qui permet un internement sans jugement pour une période de trois à quatre ans, a été officiellement aboli. Il est remplacé dans les faits par des « centres de réhabilitation » remplissant quasiment les mêmes fonctions. En revanche, le système de « réforme par le travail2 » a été maintenu. Les opposants politiques ou religieux condamnés par la justice sont internés dans des prisons situées à la campagne ou en zone périurbaine où le travail est obligatoire. Les informations sur le laogai en Chine sont classées « secret d’État », mais on considère qu’il y aurait entre 500 000 et 2 millions de détenus. Ce système a été porté à son paroxysme dans la région autonome du Xinjiang où, selon un rapport récent, plus de 500 000 personnes seraient soumises au travail forcé3. En outre, de nombreux dissidents non encore « criminalisés » sont « assignés à résidence » ou surveillés en permanence par la police. C’est le cas de ceux qui sont tentés d’exposer la réalité de la gestion de la pandémie.