Est-ce la fin de Hong Kong ?
En 1997, lorsque Hong Kong est rétrocédé à la Chine, Pékin s’engage à préserver l’autonomie et la spécificité politique, sociale et économique de l’ex-colonie britannique pendant au moins cinquante ans, selon le principe énoncé par Deng Xiaoping : « Un pays, deux systèmes. » Cette règle, qui s’applique à l’autre zone administrative spéciale de Macao, devait servir de modèle au processus de réunification avec Taïwan.
Toutefois, plus de vingt ans après la rétrocession, le sentiment d’hostilité à l’égard des autorités chinoises se renforce, Hong Kong a connu plusieurs mouvements de protestation depuis 2014, et la « révolution des parapluies ». Les manifestants pour la démocratie ont occupé le cœur de la cité-État pendant des semaines, pour marquer leur opposition face à la décision de Pékin de n’autoriser que des candidats « présélectionnés » par le pouvoir central aux futures élections directes du chef de l’exécutif. Les manifestations se sont poursuivies, à chaque velléité du pouvoir central d’imposer son autorité, pour culminer en 2019-2020 avec plusieurs mois d’opposition à la nouvelle loi d’extradition, posant un défi majeur au pouvoir de Pékin. Le taux de Hongkongais qui se déclarent « fiers d’être chinois » se réduit (29 % en 20201). Traduction de cette évolution, lors des élections législatives de 2016, une force nouvelle, dite « localiste », représentée par de jeunes activistes favorables à l’autodétermination ou, pour certains, à l’indépendance de Hong Kong, a obtenu près de 20 % des suffrages exprimés.
Cette insatisfaction croissante est due à diverses causes. Contrairement aux espérances d’une partie de la population de Hong Kong, Pékin s’oppose au processus de démocratisation du système politique chinois. Le chef de l’exécutif est élu par un collège électoral réduit de 1 200 personnes, en grande majorité favorables à Pékin. Lors des élections de mars 2017, Carrie Lam, candidate choisie par le pouvoir central, a été élue avec 777 voies sur une population de 7 millions d’habitants.
À cela s’ajoute l’ingérence croissante de Pékin dans la vie de la cité, sans respect pour le principe d’autonomie accordé en 1997. En 2016, Pékin, qui n’en n’a officiellement pas l’autorisation, a empêché nombre de candidats de se présenter aux élections au Legco (legislative council) en raison de leurs positions indépendantistes. En 2017, la Chine a également poussé à l’emprisonnement de trois responsables du mouvement des parapluies.
Surtout, en 2020, Pékin a fait passer en force une « loi de sécurité nationale » qui menace toute personne, chinoise ou résidente, accusée de « soutenir le séparatisme » ou de diffuser des « idées hostiles ». De nombreuses arrestations ont eu lieu dans les rangs des opposants dont beaucoup choisissent l’exil. Avec cette loi, Hong Kong a perdu, avant l’échéance prévue de 2047, son statut de zone spéciale garant d’un niveau minimum de liberté d’expression. Au-delà du politique, c’est le statut économique autonome de Hong Kong qui a également été remis en cause par cette loi2.