Existe-t-il des limites à la toute-puissance du Parti communiste Chinois ?

Existe-t-il des limites à la toute-puissance du Parti communiste Chinois ?

Selon le principe du centralisme démocratique, le contrôle absolu du Parti communiste s’effectue par l’intermédiaire de ses 90 millions de membres et des cellules du Parti présentes dans toutes les institutions officielles et semi-officielles en Chine. Les organes de l’État sont doublés par ceux du Parti communiste et les « cadres » du Parti occupent des fonctions de rang équivalent au sein des organisations étatiques. En 2019, Xi Jinping a réaffirmé la domination du Parti communiste sur toutes les organisations, lui-même se situant « au cœur » du Parti. Le pouvoir s’exerce à travers de multiples commissions que Xi Jinping préside. Le contrôle idéologique et institutionnel des instances dirigeantes du Parti communiste a été renforcé aux dépens de la « démocratie interne » du Parti. Comme le proclame une déclaration officielle des dirigeants à l’occasion du 19e congrès en 2017 : « Le Parti communiste gouverne tout : le Parti, le gouvernement, l’armée, la société, l’éducation, l’Est, l’Ouest, le Nord et le Sud. »

Des cellules existent dans les entreprises d’État, et dans les entreprises semi-privées ou privées, chinoises ou étrangères, ainsi que dans les organisations officielles de la société civile telles que les ONG qui ont au moins trois membres du Parti communiste. En 2018, de nouvelles règles ont renforcé l’obligation d’établir des cellules du Parti dans toutes les organisations1. L’armée, le système judiciaire, les médias, l’enseignement sont soumis au contrôle du Parti. Ce système renforce l’opacité en brouillant l’organigramme de la prise de décision dans les entreprises ou les institutions.

Dans l’armée, dont l’autorité suprême est la Commission militaire centrale du Parti communiste, la hiérarchie des commissaires politiques s’impose à la hiérarchie militaire opérationnelle. La question de l’autorité et de la chaîne de commandement, en cas de conflit par exemple, n’est pas clarifiée, et pèse sur la modernisation des capacités de l’APL dans le contexte hypertechnologique des guerres contemporaines2.

Les cellules du Parti permettent de relayer les directives de la direction et de contrôler toute critique. Des « campagnes d’éducation » sont organisées pour mobiliser et mettre en œuvre les décisions adoptées. Pourtant, à tous les niveaux, le Parti doit aussi composer avec des forces qu’il ne maîtrise pas en dépit des efforts de reprise en main de Xi Jinping. Les réseaux d’alliance et de loyauté, qui répondent à des logiques différentes de celle du Parti, sont à la source de blocages qui limitent l’efficacité de ce maillage très fin, censé mobiliser l’ensemble de la société. La marge d’interprétation et de mise en œuvre par les secrétaires du Parti au niveau local diminue la portée des directives adoptées au niveau central si celles-ci ne correspondent pas à leurs intérêts. En 2020, le Premier ministre Li Keqiang a rappelé l’obligation de transparence en ce qui concerne les nouveaux cas Covid-19.

L’imbrication des réseaux économiques et de pouvoir dans les grandes entreprises d’État, les groupes de pression puissants, notamment dans les secteurs de l’immobilier et de l’énergie, le poids des autorités provinciales et la rivalité au sommet de l’État entre grands ministères influencent la capacité des autorités centrales du Parti communiste à imposer les décisions malgré la toute-puissance institutionnelle.